Les camions de déménagement en tête du cortège ouvriraient les réjouissances, tandis que le bal des cartons ferait tourner quelques têtes. Matelas, meubles et canapés usagers descendraient dans les rues et fleuriraient les trottoirs. Ce scénario faussement futuriste décrit le quotidien des Québécois au premier juillet de chaque année.
A cette date, entre 200 000 et 250 000 ménages quittent le domicile qu'ils occupaient jusqu'alors pour faire cap vers leur nouvelle adresse. Ce phénomène social dont Québec se fait le théâtre la belle saison venue, est imputable aux dispositions d'une loi ancienne qui fixait le 1 mai comme date unique d'échéance des contrats de location.
En 1974, l'Assemblée nationale du Québec décida de confier aux futurs propriétaires et locataires, le soin de convenir ensemble d'un jour à compter duquel le lien juridique les unissant prendrait fin, dans le strict respect des limites légales. Pour les baux dont l'exécution était en cours au moment de la promulgation de la loi nouvelle, des dispositions transitoires furent adoptées. Ainsi, il fut tranché que les baux dont l'échéance étaient initialement fixée au 1 mai sous le coup de la loi ancienne, se prolongeraient jusqu'au 1 juillet de l'année en cours, afin de ne pas bouleverser les habitudes des enfants scolarisés à quelques semaines seulement des grandes vacances.
Ce texte à l'éphémérité programmée en raison de son statut réputé transitoire, entra finalement dans les habitudes des Québécois, qui tacitement élevèrent cette date au rang de « journée du déménagement ». De cet usage communément admis, découle un certain nombre de conséquences pratiques... Sur cette période, la province prend des allures de vide-greniers géant tandis que le taux horaire des déménageurs s’embrase. Or, à en croire les statistiques, ces impondérables ne semblent pas entamer la folie nomade des Québécois dont certaines reconnaissent bien volontiers déménager tous les deux ans... et vous l'aurez compris toujours à la même date !
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